Mise en scène : Tetsuya Nakashima
Avec : Kôji Yakusho, Nana Komatsu, Satoshi Tsumabuki
Japon, drame, thriller, 118 ', Sortie : 2014
sa
mère fait appel à son ex mari, flic alcoolique, pour qu'il retrouve
leur fille.
Mais
celui-ci va découvrir que sous les apparences,
l'univers
de l'adolescente est plus trouble qu'il n'y paraît...
Mon
Avis
Intro:
The
World of Kanako (Kawaki en japonais)
est l'adaptation d'un roman de
Akio Fukamachi, décrit comme un drame violent.
Nakashima,
au moment du tournage l'été dernier, commentait:
"Mon
but est de réaliser un fantasme de violence
comme on n'en a jamais
vu avant dans le cinéma japonais.
A
l'heure actuelle, l'équipe du film et la distribution sont couverts
de sang".
.
Chute:
Mission
accomplie pour le fantasme et bien au delà !
Kanako,
c'est 118' ou l'on oublie de respirer
Kanako,une
nouvelle référence dans le film noir
Kanako,
pas pour tout public
Plus
de détails, voir sous la BA l'analyse sur "film de culte"
qui en parle beaucoup mieux que moi
...
...
Critique
de Gregory Coutaut sur FilmDeCulte
.
Il
est toujours trop tôt pour faire ce genre de raccourci (ou trop
simple), mais dans la carrière de Tetsuya Nakashima, il y a
peut-être eu un avant et après Confessions.
Pas
tant à cause du succès inattendu et fou de ce film tout aussi dingo
(des salles nippones bondées jusqu'à une présence dans la
shortlist des nommés aux Oscars),
mais
plutôt parce l'appétit du réalisateur pour l'hystérie colorée,
kawaï et bondissante s'y trouvait teintée d'une noirceur
inattendue.
Les
changements de registres, de rythme et autres tours de grand huit ne
faisaient qu'y mettre en avant l'angoisse amère des personnages.
Amère,
c'est un euphémisme qui pourrait tenter de décrire la descente aux
enfers des personnages de The World of Kanako.
Une
nouvelle nuance de noir encore plus foncé serait utile pour rendre
justice à un récit qui, sur le papier,
rappelle
le nihilisme jusqu'au-boutiste de certains polars coréens.
Mais
sur le papier uniquement, car grâce à la Nakashima's touch,
The
World of Kanako ne ressemble jamais à un thriller classique et ne
ressemble d'ailleurs à rien d'autre qu'à lui-même.
C'est
un ouragan.
Montage ultra-saccadé, couleurs chatoyantes, changement de registres brutaux (mais habiles), recours presque subliminaux à l'animation, structure en flashback...
Montage ultra-saccadé, couleurs chatoyantes, changement de registres brutaux (mais habiles), recours presque subliminaux à l'animation, structure en flashback...
ces
effets pourraient paraitre gratuits mais forgent au contraire un
ensemble cohérent et particulièrement dense, un remous permanent
qui parfois épuise mais le plus souvent fascine.
Tout
ceci serait sans doute stérile si, dès la citation placée en
exergue, Nakashima ne plaçait pas son film dans l'héritage
inattendu du surréalisme.
De
Cocteau à Lewis Carroll, on a beaucoup théorisé sur les symboles
et métaphores autour des psychotropes dans l'oeuvre des
surréalistes.
Il
est effectivement question de drogues dans The World of Kanako.
Au
sens propre bien sûr, mais aussi de manière plus imagée.
Et
c'est sur ce terrain-là que Nakashima se singularise le plus.
En
prenant suffisamment au sérieux la propre folie qu'il peut injecter
dans ce récit en le distordant,
il
témoigne d'une confiance enthousiasmante dans la technique du médium
cinéma.
Voilà
un cinéaste qui n'a pas peur del'image, qui n'a pas peur du montage,
et
qui parvient à garder le cap sans jamais se laisser piéger par sa
propre fantaisie.
Comme la Laura Palmer de Twin Peaks, l'héroïne éponyme dévoile au fil de l'enquête un visage bien plus sombre que prévu.
Comme la Laura Palmer de Twin Peaks, l'héroïne éponyme dévoile au fil de l'enquête un visage bien plus sombre que prévu.
Au
point d'entraîner chacun dans sa chute hallucinée.
Tous
ceux qui vont croiser son chemin vont faire l'expérience d'une
fascination presque surhumaine, qui les laissera littéralement
détruits.
Il
y a effectivement quelque chose de la chute infinie d'Alice dans son
trou de lapin, dans le parcours de Kanako et des autres.
Pour
tous, c'est comme si la chute de plus en plus profonde dans la psyché
de Kanako,
le
manque progressif d'oxygène et de discernement, venaient dilater le
réel.
Jusqu'à
flirter avec le fantastique, lors d'une séquence où la quête
virerait presque à la chasse au démon mythique.
L'expérience
n'est pas loin d'être la même pour le spectateur, hypnotisé mais
aussi parfois privé de respiration par
un film qui prend à la gorge et ne connaît pas répit.
The
World of Kanako peut paraitre anxiogène, mais c'est surtout un chef
d'oeuvre flamboyant.